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17 novembre 2010

Liberté spirituelle

Matter is an expression of spirit, so the only thing that matters is spirit.
(Alan Cohen) 

Ce chapitre réunit quelques ingrédients supplémentaires pouvant aider à transcender la réalité terrestre et à inverser le processus d’identification à l’ego.

Acceptation et paix de l’esprit

L’an 2000 marqua la fin et le début de plusieurs choses; c’était dans l’air… Plusieurs de mes connaissances ont vécu des déconfitures majeures. Préfigurant le «Ground zero», mes propres tours d’illusions se sont écrasées, laissant un trou béant que je ne voulais pas remplir de clinquant.

Le bon côté de la chose fut que cette crise m’a poussée à revisiter le bouddhisme zen. Un livre inspiré/inspirant, The Zen Path through Depression, m’a fourni les ailes dont j’avais besoin. Une fois dans la tour d’observation virtuelle, j’ai pu faire un bilan de ma vie selon une perspective beaucoup plus vaste.

Le zen nous propose de vivre le quotidien avec souplesse, de nous détacher de la cacophonie mentale et émotionnelle et de coller le plus possible à la réalité du moment présent. Lorsque nous avons le sentiment d’avoir fait le tour d’une situation et que nous n’entrevoyons pas de solution, Katagari Roshi nous dit : «Assieds-toi, tais-toi, et observe ce qui se passe». 

Le bouddhisme ne reconnaît que trois sortes de sensations : plaisante, déplaisante et neutre. En état de dépression, seules les deux dernières semblent exister. Notre perte d’intérêt touche tous les domaines de la vie. Nous avons parfois l’impression que l’hyperactivité nous sauvera de la morosité. Mais rien n’y fait, étant donné que nous ne pouvons pas nous fuir nous-mêmes. La dépression nous renvoie à l’intérieur, et si nous refusons d’y aller, le sentiment d’impuissance s’incruste. Néanmoins, tôt ou tard, nous découvrons que nous pouvons survivre à la ruine de l’ego. «Il faut comprendre la différence entre douleur et souffrance : on ne peut pas éviter la douleur, mais la souffrance qui provient de notre tentative d’éviter la douleur n’est pas nécessaire et peut s’éliminer par l’acceptation de la douleur.» (Philip Martin, psychiatre, travailleur social, diplômé en psychologie bouddhique, auteur de The Zen Path through Depression) 

La pratique zen nous demande d’accueillir tout ce qui se présente, tel quel, sans chercher à obtenir un maximum de satisfaction égoïste, sans esquiver les pensées désagréables ni faire durer les agréables par la volonté.

Comme avec la plupart des techniques de méditation orientales, le zen se veut un antidote absolu aux spéculations et aux fantasmes dépourvus de réalité concrète, habituellement éveillés par des jugements, des opinions erronées, des émotions récurrentes, des souvenirs déformés et des rêves d’avenir chimériques.

Environ 45 000 pensées nous passent par la tête quotidiennement. L’exercice consistant à écrire pendant deux à trois heures toutes les pensées qui surviennent, sans cliver ni censurer est une technique de vidange efficace. On est ébahi de constater à quel point les obsessions occupent la majeure partie de notre vie mentale.

Après un tel exercice, l’on ne se demande plus comment se crée notre réalité … Lorsque nous observons nos pensées, nous réalisons rapidement que 90% de nos préoccupations sont effectivement reliées à des souvenirs et à des anticipations. Par ailleurs, la quantité fabuleuse de trivialités qui encombrent notre boîte de Pandore (liste d’épicerie, comptes à payer, travail, remarques désobligeantes d’Untel…) est plutôt désolante. La méditation sert à vider notre corbeille, favorise la vigilance et nous habitue graduellement à recevoir des intuitions et des pensées plus lumineuses.

La sortie de secours : le Soi authentique?

«La guidance intérieure libère de la dépendance aux croyances des autres. La guidance intérieure libère de la dépendance aux normes acceptées. La guidance intérieure est ce qui nous donne du pouvoir en tant qu’individus.» (Plusieurs grands instructeurs répètent cela depuis des lustres!) 

La sagesse ancienne nous dit que tout être est doté d’une «Essence», d’une intelligence supérieure, logée au plus profond de lui-même. Cette intelligence porte des appellations différentes selon les écoles de pensée : Ego spirituel, âme transpersonnelle, moi supérieur, présence, âme divine, soi authentique, etc. D’un autre côté, plusieurs instructeurs spirituels ne font pas de distinction entre ego, personnalité, âme, essence ou soi, des aspects qu’ils considèrent comme un tout indivisible. On ne trouve guère de consensus à ce propos. En ce qui me concerne, j’ai énormément de difficulté à utiliser le mot «Dieu», un mot tellement galvaudé qu’il ne veut plus rien dire. De toute façon ma conception de «Dieu» a énormément changé. Pour moi, cette source est la somme totale de tout ce qui existe, c’est-à-dire, un réservoir de créations, de projections et de créatures plus ou moins évoluées, à une échelle qu’on ne peut pas évaluer. Elle n’est, par ailleurs, pas plus évoluée que ses parties les plus évoluées, et qui ne cessent elles-mêmes d’évoluer.

Durant l’ego trip terrestre, l’âme (laissée à elle-même au début) est plutôt aveugle, piégée dans le processus de l’individualisation, et coupée des dimensions spirituelles. Avec le temps et l’expérience, elle finit par s’éveiller à des dimensions plus vastes. Vers la fin de l’ego trip, le Soi authentique aide l’âme à se désidentifier de l’ego et conséquemment à se libérer des chaînes de la matière. Le Soi est la véritable identité à laquelle l’âme finit par se subordonner volontairement, dans une vie ou une autre.

Lorsque l’âme intègre les fréquences du Soi, la personnalité peut accéder à des ressources de connaissance, de conscience, de compassion, d’activité créatrice et d’illumination qui échappent à la conscience humaine élémentaire. La personnalité s’ouvre à des impulsions tournées vers des valeurs, des aspirations et des inspirations supérieures. Les psychologues traditionnels et ésotériques s’entendent pour dire que lorsqu’un individu est branché sur l’intelligence supérieure du Soi et de l’Esprit universel, ses activités se font dans la joie, l’enthousiasme, l’entrain et la générosité. La personnalité est également immergée dans son activité par simple plaisir, sa récompense étant de la pratiquer. L’ego laissé à lui-même détruit toujours la joie pure. Ce qui fait tout l’intérêt de l’intégration, fusse-t-elle temporaire, c’est que le «petit moi» disparaît complètement dans ces moments-là.

L’illumination, c’est d’abord la liberté d’être le raté que l’on est.
(Alan Watts)

Notre collection d’identités plus ou moins évoluées forme une sorte de mémoire autodéterminée. Les egos développent certes des talents et des qualités au cours de leurs incarnations, mais à mon avis, ces acquis ont une valeur subjective applicable surtout au contexte de la vie matérielle. On n’a pas besoin d’instruments de musique ou de synthétiseurs pour jouer de la musique, ni de pinceaux pour créer des tableaux de l’autre côté du voile.

Notre corps n’est pas multidimensionnel, mais notre esprit l’est et le sera toujours, que nous soyons incarnés ou non. Lorsque nous dormons la nuit, nous continuons de vivre par l’esprit sans la participation du corps physique, bien qu’il puisse parfois réagir au vécu onirique astral. Si nos peurs ne font pas obstacle, nous pouvons voyager partout avec notre esprit.

«Au cœur même de la prison de nos pensées, de notre absurdité, il y a un pays où nous ne sommes ni jeunes ni vieux, ni beaux ni laids. Une terre de joie et de liberté. Pour voyager dans ce pays, il faut perdre tous ses bagages, le sens de l’orientation et l’adresse de tous les hôtels.» (Claude Leclerc, La Sortie est à l’intérieur, Une invitation au voyage spirituel)

La créativité : compenser les limites humaines 

L’imagination a été donnée aux hommes pour les dédommager
de ce qu’ils ne sont pas.
(Auteur inconnu)

Qu’on croit ou non à la survie de ce qui permet au corps physique de vivre, il reste que tant qu’on est là, il y a bel et bien une énergie aux commandes. Aussitôt qu’une rupture de courant définitive se produit, c’est la mort physique. À mon avis, deux locataires se partagent l’habitacle – l’ego (personnalité identitaire) et l’Ego (identité immatérielle). Si la personnalité identitaire prend toute la place l’Ego est généralement inaccessible car il n’arrive pas à se frayer un chemin à travers la cacophonie mentale et émotionnelle du petit ego.

Jean Sébastien Bach à qui l’on demandait où il puisait ses mélodies aurait répondu : «L’affaire n’est pas de les trouver, mais plutôt de ne pas les piétiner le matin en sautant hors du lit.»

On retrouve le même sentiment d’abandon chez les profanes : «J’ai l’impression que ces idées flottent dans l’air à la ronde et qu’elles me désignent pour que je les développe. Ce sont elles qui viennent à moi, non pas moi qui les crée à volonté.» Joseph Heller, auteur de Catch 22

Quel que soit le nom qu’on donne à cette source d’inspiration, «Dieu», Soi ou Esprit universel, tous les intuitifs s’entendent pour dire qu’ils sont littéralement les «canaux» de cette source.

L’intuition se manifeste d’elle-même, naturellement, qu’il s’agisse d’un banal pressentiment, d’une décision terre-à-terre ou d’une découverte spectaculaire. L’intuition ne fonctionne pas sur commande, elle jaillit soudainement de l’intérieur. Encore faut-il être capable de la valider ou de l’accepter. Bach disait à ce propos : «Je joue les notes dans l’ordre où je les ai écrites. C’est Dieu qui compose la musique.»

L’intuition vient aux esprits patients, réceptifs et disponibles. Le silence et la détente sont indispensables à la réceptivité. La méditation facilite l’écoute de la vie intérieure qui à son tour favorise l’intuition. Malheureusement, notre mental est toujours trop occupé, stressé et encombré par les pensées de notre entourage et des médias. Lorsqu’on a une vie trépidante – la pédale d’accélération toujours collée au plancher –, il faut vraiment se forcer pour trouver des moments propices à la rêverie et à la détente. Les balades en voiture ou les marches solitaires offrent d’excellentes opportunités de voyager à l’intérieur.

L’intuition est la composante de base de la créativité, mais elle a besoin de volonté, de courage et d’enthousiasme pour se concrétiser. Les recherches démontrent que les gens très créatifs font plus d’erreurs que ceux qui le sont moins – non pas que les seconds manquent d’imagination, c’est plutôt l’esprit d’initiative qui fait défaut.

Les créateurs brassent plus d’idées, cherchent de nouvelles possibilités et osent démarrer des projets. Parfois, ils gagnent, parfois, ils perdent; mais, ils acceptent de perdre. Voilà peut-être ce qui les différencie des gens qu’on dit moins créatifs. Car se fier à son intuition c’est miser sur du virtuel et rien ne garantit le succès.

En réalité, «le Soi» nous fournit des antennes pour capter les mondes invisibles de l’imagination; c’est à travers l’intuition qu’il nous transmet sa créativité dont émergent des sentiments de pure joie, de sérénité et de liberté.

Principaux obstacles à la créativité 

• Censure, évaluation
• Comparaison, compétition
• Perfectionnisme, autocritique
• Peur du jugement et du rejet
• Rationalisation stérile
• Stress mental
• Pression
• Conformisme

Attitudes qui facilitent la créativité 

• Repousser sa négativité et ses limites 
• Sortir des sentiers battus
• Varier ses intérêts, être curieux
• Suivre ses passions
• Fréquenter des gens créatifs (inspirant et stimulant) 
• Oser prendre des risques
• Passer à l’action, réaliser ses projets

En chaque œuvre de génie nous reconnaissons nos propres pensées rejetées.
(Ralph Waldo Emerson)

Le leitmotiv de la créativité : rien sans la joie!

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